J'sais pas quoi faire...
L'ennui, le "J'sais pas quoi faire" est quelque chose
dont se plaignent souvent les enfants..
Alors on arrive là, nous, parent, avec nos grands sabots de sauveur, pour proposer un tas de choses à faire à notre enfant qui s'ennuie...
Et, vous l'avez surement remarqué : Jamais (ou alors c'est très rare) ce qu'on leur propose ne leur convient.
Alors l'ennui de notre enfant devient le nôtre, celui de ne pas savoir quoi faire pour qu'il ne s'ennuie plus...nous renvoie à notre impuissance, à notre besoin de maitrise, à notre angoisse très archaique du vide, de l'absence.
Je ne sais combien de fois j'ai dit à ma mère, enfant, que je m'ennuyais.
Mais je m'ennuyais souvent et elle a dû l'entendre souvent ce : maman, j'sais pas quoi faire, et j'ai souvent dû entendre sa réponse :
Et bien je ne sais pas, moi:
joue ! (mais à quoi ?),
va voir si Marie est là ! (Bof, Marie !),
range ta chambre ! (Ouaifff, bof !),
prends un livre ! (J'les ai déjà tous lus),
va faire un tour dans le jardin ! ... tiens, aide-moi pour le ménage...
Bref, ma chère mère ne savait pas quoi faire de moi lorsque je m'ennuyais... et sans doute en ce sens, ressemble-t-elle ou a-t-elle ressemblé à toutes les mères du monde.
Je veux dire : Et alors ? Qu'est-ce que ça peut faire, qu'un enfant s'ennuie ?
Oui, je sais, je suis un peu décalée, peut-être. Et cependant je ne crois pas que l'ennui soit forcément «mauvais». Il peut être source de souffrance et... d'ennui, il peut être témoin de mélancolie, voire de dépression, mais en général il ne reflète que la difficulté momentanée d'un enfant à s'intéresser à quelque chose, à s'occuper seul, voire à prendre une décision responsable quant à l'occupation de son temps.
Il faut dire que nous, parents, sommes aussi très forts pour «occuper» nos enfants en permanence, pour veiller à ce qu'ils aient toujours quelque chose à faire, très forts pour mettre tout en œuvre pour qu'il n'y ait pas de temps morts dans leur emploi du temps, comme si l'ennui ou le «rien-faire» était mauvais. (Nous savons bien que la paresse est "mère de tous les vices", mais peut-être confondons-nous paresse et ennui).
Lorsqu'un enfant s'ennuie, il pense (on peut s'empêcher de faire un tas de choses, mais pas de penser) et ses pensées le construisent, même si c'est parfois douloureux, même si c'est parfois torturant...
Vouloir à tout prix qu'il ne s'ennuie pas, c'est lui enlever la responsabilité de sa vie du moment, c'est prendre en charge sa problématique dont il revient à lui et à lui seul de la gérer.
Je suis effarée, parfois, par l'agenda de nos petites têtes blondes... Pire que Nico Badinguet, ... non, c'est pas possible, mais pire que leurs parents, parfois...
Lundi judo, mardi piscine, mercredi danse, dessin et révisions scolaires, jeudi judo encore, vendredi cours de solfège, et samedi... oui oui, on pourrait croire que..., mais non, le samedi, il y a encore des choses à faire... Ajouter à cela le psy et l'orthophoniste, et l'ostéopathe «parce que le petit est tendu», vous avez un agenda de certains ministre !
Il ne s'agit pas d'apprendre à s'ennuyer. Il s'agit de supporter paisiblement que nos enfants s'ennuient parfois, de les aider à se supporter eux-même s'ennuyant, de supporter de ne pas toujours leur «apporter» une occupation sur un plateau, et de savoir penser paisiblement que «ne rien faire» est aussi faire quelque chose...
Il y a parfois le Je m'ennuie répété et l'incapacité de s'occuper seul qui peuvent être à entendre comme un appel, un signe de détresse, voire, je l'ai dit plus haut, signe d'un état dépressif, bien évidemment à entendre.
Mais le "Je m'ennui" peut être aussi accepté comme un épisode «normal» de la vie humaine, peut-être n'avons-nous pas à nous mobiliser outre mesure contre celui-ci...
L'ennui permet aussi à l'enfant de se poser des questions sur lui-même... et cela, c'est constructif.
P.S : N'ayant pas d'enfants je me positionne en tant que "Tata"
Bonne journée
Elie